LE DECOLLAGE DE LA PISTE
Bernard Santraine, figure importante du secteur médico-social de la métropole Lilloise est à l’origine de la dynamique qui aboutira à la création de L.M.A.C.
1978, récemment nommé directeur du foyer APF « Jean Grafteaux » à Villeneuve d’Ascq, établissement qu’il a imaginé et conçu, Bernard Santraine travaille à un projet institutionnel qui prend en compte une dynamique artistique dans la prise en charge des jeunes pour aller au-delà de la rééducation et de la scolarité. Il est persuadé que les gens passionnés par une démarche artistique peuvent faire passer à travers leur enthousiasme autant, sinon plus d’enseignements que par leur charisme éducatif.
Passionné depuis toujours par le monde du cirque, Bernard fait le pari fou qu’il peut entraîner l’énergie des jeunes résidents dans l’univers circassien. Il sait qu’en raison de sa diversité et des possibilités créatives qu’elle autorise, la piste permet d’associer en un même spectacle les capacités très différentes des jeunes.
Entouré d’une nouvelle équipe compétente, Bernard Santraine se fait les dents avec deux spectacles traditionnels mais néanmoins impressionnants en 1985 pour honorer Christian Dabbadie (pionnier de l’APF dans le Nord) récemment parti à la retraite et en 1986 pour fêter les 50 ans de l’APF dans la région.
Tout le monde est prêt à se lancer dans l’aventure de la piste. Epaulé par Michel Picavet, un éducateur fervent de cirque et Patrick Van Mechelen, kinésithérapeute, il profite du dixième anniversaire du Foyer Jean Grafteaux pour monter en 1989 :
LE MONDE MERVEILLEUX DU CIRQUE
L’éditorial du programme édité pour l’occasion commence en ces termes :
« Les handicapés font leur cirque à l’A.P.F. On aura tout vu »
Effectivement, c’est innovant, c’est créatif, c’est un peu fou, tout à l’image de son initiateur. C’est l’APF qui aura tout vu car au départ ce n’est pas tout à fait au goût des instances dirigeantes et Bernard essuie quelques réticences.
L’établissement se transforme en un immense lieu d’exposition dédié au cirque. On y retrouve sous ce thème une douzaine de déclinaisons complémentaires : expositions d’affiches, maquettes, jouets, bibliothèque, reconstitution de loges d’artistes etc.
France 3 réalise son édition de midi du journal télévisé en direct du Foyer.
Ce sera le début d’une importante médiatisation de l’IEM à travers les spectacles. Chaque année, articles et reportages de la presse nationale et locale mettent en lumière les prestations artistiques bien-sûr mais aussi par ricochet, le travail réalisé à Grafteaux autour de l’intégration scolaire et sociale.
LA RICHESSE DU PROJET
Dans l’esprit du projet, un spectacle est l’aboutissement monumental d’une activité artistique ou d’une discipline sportive pratiquée tout au long de l’année. Rien de mieux pour inciter les jeunes à s’inscrire dans les animations proposées.
La grande richesse du projet réside dans la volonté de vouloir mêler les jeunes des établissements avec les usagers des associations locales ainsi que les camarades de classe de l’école en milieu ordinaire et des artistes professionnels, tout ceci dans une interaction pédagogique et enrichissante pour tous les protagonistes. Le spectacle devient la preuve que ces jeunes sont des citoyens à part entière en participant activement à la vie culturelle de la ville. Les numéros sont conçus dans l’esprit d’une collaboration entre valides, non valides et professionnels du spectacle afin de réduire les différences et donner du sens au projet de vie de chaque jeune dans une véritable concrétisation de l’intégration (pardon ! je veux dire inclusion.). Cette volonté a perduré jusqu’à aujourd’hui. Elle est essentielle aux yeux de ceux qui perpétuent les spectacles.
LA FORCE D’UNE EQUIPE
On ne dira jamais assez combien un projet qui emporte l’adhésion de tous est une force qui rapproche les personnes, jeunes et adultes, génératrice de liens solides.
Sortir du quotidien pour vivre ensemble une aventure hors du commun a fait beaucoup dans la construction d’une certaine identité encore revendiquée par le personnel issu de l’IEM Grafteaux. Cette équipe est toujours surprenante lorsque, nonobstant leur fonction d’éducateur, de kiné, d’ergothérapeute, de femme de service, d’infirmier, de secrétaire et autres ils deviennent régisseur, équilibriste, metteur en scène, musicien, maquilleuse, ouvreuse, clown, maquettiste, magicienne, décorateur, danseur…
Dénicheurs de talent, les spectacles ont toujours fait appel à des artistes professionnels, certes souvent à leurs débuts, mais qui ont tous mené des carrières de haut niveau par la suite. De quoi mettre en valeur nos artistes en herbe qui travaillent avec eux. C’est souvent l’occasion d’échanges chaleureux et parfois émouvants. Lesquels, de nos jeunes ou de ces artistes, en sortent les plus enrichis par la rencontre d’un monde si différent ?
L’enrichissement mutuel est aussi une constante dans les interactions avec les membres des associations extérieures qui participent aux différents spectacles.
En 1996, le cirque est tellement devenu un emblème de l’identité de l’IEM que personne ne s’étonne d’y voir s’épanouir un magnifique chapiteau bleu et blanc. Grâce aux excédents dégagés des recettes des spectacles et une aide de la ville de Villeneuve d’Ascq, l’établissement vient de se doter d’un superbe outil pour promouvoir les activités artistiques. Aujourd’hui, trônant magnifiquement au milieu du parc, remis à neuf, il reste le symbole de la volonté de nos établissements de promouvoir l’expression artistique en tant que vecteur d’inclusion.
Au fil des années les spectacles évoluent en fonction de la tendance au goût du jour. L e cirque traditionnel des premiers spectacles fait place à des mises en scènes plus modernes, influencées par le cirque Plume ou le cirque du Soleil. En 2002, Bernard Santraine est à la veille de son départ à la retraite. « Eclipse » opère un tournant tout en lui rendant hommage : Le cirque se mêle au cabaret. Le spectacle intégrera à partir de « Nuances » en 2004 une importante dimension théâtrale jusqu’à quitter la piste pour retrouver la scène frontale en 2011 avec « Silence… On tourne ! ».
On pouvait penser que la boucle était bouclée. Après « Dharma » le spectacle quelque peu déstabilisant de 2007, « Silence… On tourne ! » avait réconcilié tout le monde : artistes et public, sur le contenu attendu d’un spectacle de Grafteaux Culture Sport (et maintenant L.M.A.C.) et surtout sur la manière de construire le projet. Ce beau succès était l’occasion de mettre un terme à l’aventure puisque l’I.E.M. Grafteaux disparaissait et que personne ne semblait vouloir prendre la relève dans la coordination d’un nouveau spectacle. C’était sans compter sur des volontés extérieures qui ne veulent pas voir s’éteindre la flamme qui brille dans les yeux des jeunes artistes sous les feux des projecteurs. L’association « Le rêve de Norinia » appuie des associations et des établissements pour réaliser des spectacles dans la même dynamique qui nous a animés. Elle a sollicité L.M.A.C. pour trois représentations les 27 et 28 mars 2015. Comment dire non ?
Bonne nouvelle pour les nostalgiques : le spectacle a retrouvé la piste !
Dans le magnifique écrin de la salle Grand Sud de Lille, 200 personnes se retrouvent sur la piste pour donner une gifle de bonheur au 1500 spectateurs qui ont eu la chance d’obtenir une place pour le spectacle.
Le pari est gagné, la magie a opéré.
CIRQUE EN PLUS
- 12 éditions
- 49 représentations à Villeneuve d’Ascq, Marseille, Paris, Lisbonne, Lille, Hazebrouck, Bailleul.
- 21 500 spectateurs
- 1989 LE MONDE MERVEILLEUX DU CIRQUE
- 1991 FESTIVAL DE CIRQUE
- 1993 L’EUROPE DANS UN FAUTEUIL
- 1996 LE CIRQUE FAIT SON CINEMA
- 1998 FEES D’HIVER
- 2000 LE CIRQUE AURAIT-IL 2000 ANS ?
- 2002 ECLIPSE
- 2004 NUANCES
- 2007 DHARMA
- 2011 SILENCE… ON TOURNE !
- 2015 EN PISTE ! LES GÉANTS TOURNENT…
- 2017 CHACUN FAIT AS MODE
Ils sont venus ou ont soutenu les spectacles :
- Arlette Gruss
- Jean Claude Casadesus
- Patrice Dard
- Bernard Montiel
- Jean Claude Malgoire
- Michel Drucker
- Jenny Clèves
- Alexis Gruss
- Bernard Barataud
- Fred et Jamy « C’est pas Sorcier »
- Emilien Bouglionne
- Tronchet
- Thierry Féery
- Madame Cartier
est une association qui prolonge la riche et longue expérience de l’IEM Jean Grafteaux et a pris le relais des associations « Association Sportive et Culturelle du Foyer Grafteaux » et « GRAFTEAUX CULTURE SPORT ». Elle a été créée dans le but de fédérer des structures médico-sociales et des associations partenaires pour faciliter la mise en commun de compétences humaines, de moyens techniques et financiers afin de permettre la réalisation de manifestations culturelles et artistiques visant la promotion de la personne en situation de handicap.
LMAC 39 avenue du Bois 59650 Villeneuve d’Ascq
Cette association qui a son siège national à Wasquehal monte depuis quelques années des spectacles dans toute la France. Travaillant avec des publics porteurs de handicap, par ces spectacles, elle veut leur permettre de retrouver une certaine confiance en soi ; en valorisant le talent et le savoir-faire, en donnant aux participants une place à part entière.
Le but est de créer des passerelles entre leurs univers et ceux, plus artistiques, du cirque, de la danse, de la musique, du conte et du théâtre.